Jean-Louis SCHLIENGER, Strasbourg
Kristensen KB et al. Effects of a low-carbohydrate-high-protein pre-exercise meal in type 1 diabetes—a randomized crossover trial. J Clin Endocrinol Met 2024 ; 109 : 208-16.
La crainte de l’hypoglycémie est l’un des freins à la pratique d’une activité physique régulière (APR) chez les personnes atteintes de diabète de type 1. Pourtant les bénéfices de l’APR sont bien établis dans le DT1 comme dans le DT2. Les guidelines pour la prévention de l’hypoglycémie liée à l’exercice préconisent une réduction des doses de bolus et/ou d’insuline basale et une augmentation des apports glucidiques avant l’exercice adaptée à l’intensité et de la durée prévue de l’exercice. Les autres macronutriments sont laissés dans l’ombre alors qu’ils interviennent également sur la variation de la glycémie post-prandiale. Ainsi, il a été montré, dans les conditions de repos, que les apports protéiques prolongent la réponse glycémique post-prandiale, ce qui pourrait être un facteur protecteur contre l’hypoglycémie d’effort.
Cette étude effectuée au STENO Diabetes Center de Copenhague a comparé les effets sur la glycémie de deux repas isocaloriques pris avant un exercice, l’un riche en protéines et pauvre en glucides (HPLG 52 %/21 %) et l’autre riche en glucides et pauvre en protéine (HGLP 52 %/21 %) chez des sujets DT1. Elle a été conçue pour vérifier l’hypothèse selon laquelle un repas riche en protéines était associé à un profil glycémique plus rassurant pendant et après l’exercice. Les 14 sujets DT1 randomisés en 2 groupes croisés étaient traités par une pompe à insuline et utilisaient un système de contrôle continu de la glycémie. Ils n’étaient pas obèses, avaient une HbA1c < 8 % et pratiquaient une APR. Les conditions d’étude ont été standardisées avec une optimisation de l’insulinothérapie avant l’étude et un ajustement en cours d’étude en appliquant les directives internationales : réduction de la dose d’insuline basale de 35 % entre l’ingestion du repas et la fin de l’exercice et réduction du bolus préprandial de 25 %. Les participants ingéraient le repas test (environ 500 kcal) 90 minutes avant d’entreprendre une séance d’exercice continu d’intensité modérée (60 % VO2) d’une durée de 45 min.
Au cours de la période de 3 heures post-exercice, la glycémie moyenne avait tendance à être paradoxalement plus élevée sous HPLG que sous HGLP (10,05 ± 2,44 vs 7,76 ± 3,04 mmol/L, p = 0,063). La diminution de l’insulinémie a été comparable dans les 2 groupes pendant la phase de récupération. À la fin de l’exercice l’augmentation de la glucagonémie était plus marquée dans le groupe HPLG (Δ + 11,5 ± 6,8 vs Δ + 3,3 ± 3,9 pmol/L, p = 0,005). Les taux d’acides gras libres étaient plus élevés après l’exercice après un repas HPLG (0,45 ± 0,17 vs 0,28 ± 0,10 mmol/L, p = 0,006). Un seul épisode hypoglycémique a été observé après le repas riche en protéine contre 4 après le repas riche en glucides.
Dans cette étude, un repas riche en protéines ingéré avant un exercice a atténué le déclin de la glycémie pendant l’exercice, réduit l’insulinémie et augmenté la glucagonémie par rapport à un repas enrichi en glucides conformément aux recommandations visant à prévenir l’hypoglycémie d’effort chez des sujets DT1. L’enrichissement protéique du repas précédant l’effort pourrait être une stratégie plus intéressante que le repas hyperglucidique habituellement conseillé pour éviter l’hypoglycémie d’effort. Posture à vérifier par d’autres études avant de bousculer les dogmes !